Suppression de la taxe professionnelle: qui va payer? Les ménages.

Publié le par LE LABO76

Par Nicolas Mayer-Rossignol, LABO76.

Le gouvernement a rendu publics plusieurs projets de lois concernant les collectivités locales, dont un qui prévoit la
 suppression de la taxe professionnelle (TP).

La grande majorité du monde politique, à droite et à gauche, s'accorde à dire que la TP est un impôt économiquement inadapté, qui pénalise l'investissement. Le réformer est donc nécessaire.

Néanmoins, la TP constitue aujourd’hui une ressource majeure (43.9% en moyenne, soit 25 milliards d'Euros au total) pour les collectivités locales, qui agissent au quotidien pour tous les Français : écoles, collèges, lycées, transports publics, aide aux personnes âgées, qualité de l’environnement, soutien aux associations culturelles et sportives….


Selon les chiffres officiels, la suppression de la TP entraînera une diminution de la charge fiscale -c'est à dire des impôts en moins- pour les entreprises de 11,7 milliards d'Euros en 2010 et de 5,8 milliards d'Euros par an ensuite
[1].

Le gouvernement s’est engagé à ce que l’intégralité du manque à gagner dû à la suppression de la TP soit compensée. Or, ces 5,8 à 11,7 milliards représentent une perte nette pour les finances publiques (qu’elles soient de l’Etat ou des collectivités, peu importe). C'est une ressource budgétaire en moins. Elle ne peut donc être compensée par de simples transferts fiscaux de l’Etat vers les collectivités (des recettes auparavant perçues par l’Etat le seraient désormais par les collectivités), ce qui serait neutre pour les contribuables.

Il y a donc 5,8 à 11,7 milliards d'Euros à trouver. Et il n’y a que trois moyens de le faire :

  1. augmenter les impôts sur les entreprises, ce qui n’aurait évidemment pas de sens puisque l’objectif du projet gouvernemental est précisément de les diminuer.
  2. augmenter les impôts sur les ménages. Il y a environ 26 millions de ménages en France. Cela reviendrait donc à créer un nouvel impôt sur tous les contribuables de 11,7/26=450 Euros par ménage en 2010, et de 5,8/26=223 Euros/an ensuite.
  3. accroître le déficit et l’endettement de l’Etat, qui atteignent d’ores et déjà des sommets. Cette alternative revient en fait à la précédente, puisqu’il faudra bien, un jour, que les Français soient mis à contribution pour que la France honore ses dettes.
  4. (une quatrième option existe en théorie : réduire drastiquement les dépenses de l’Etat de manière à dégager une marge de plusieurs milliards d’Euros, ce qui n’est clairement pas envisagé.)

Le gouvernement certifie que la suppression de la TP sera intégralement compensée pour les collectivités locales. Compte tenu de l'état des finances nationales, il est difficile de le croire. Mais même avec les yeux de la foi, il faudra, pour assurer cette compensation, trouver plusieurs milliards d'Euros. Et comme  cela ne se trouve pas sous le pied d’un cheval, il faudra bien que le gouvernement augmente l’impôt des Français : pour 2010, ce sera 450 Euros par ménage.

Comme la baisse de la TVA pour les restaurateurs (2,5 milliards/an) ou la défiscalisation des heures supplémentaires (4,5 milliards/an), la réforme annoncée de la TP n’est jamais qu’un nouvel allègement fiscal pour les entreprises,

qui va coûter à l’Etat plusieurs milliards d’Euros par an et qui signifie, après la taxe carbone, la hausse du forfait hospitalier, les 'franchises' médicales, la taxation des arrêts maladie... un nouvel impôt sur la tête des Français les moins fortunés.

Nicolas Mayer-Rossignol est animateur du LABO76.


 

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